L’organisation qui gère le zoo du Bronx finance de graves atteintes aux droits de l’homme

25 Juillet 2017

En République du Congo, de vastes pans des terres ancestrales des Bayaka ont été saisis sans le consentement de ces derniers par des sociétés d’exploitation forestière et de grandes ONG de conservation de la nature. © Lambert Coleman

Cette page a été créée en 2017 et pourrait contenir des termes à présent obsolètes.

Une enquête de Survival International a révélé que la Wildlife Conservation Society (WCS), l’organisation qui gère le zoo du Bronx à New York, finance l’éviction des “Pygmées” bayaka et d’autres peuples autochtones de la forêt tropicale en République du Congo, de même qu’elle finance les violences commises à leur encontre.

La WCS gère un parc national sur le territoire bayaka, qu’elle a contribué à créer sans le consentement des populations autochtones concernées, et a passé un accord avec deux entreprises d’exploitation forestière travaillant sur ces terres. La WCS finance également des brigades de lutte contre le braconnage qui empêchent les Bayaka de pénétrer sur leurs terres ancestrales. Survival International a recensé des dizaines de cas de harcèlement, de passages à tabac et même de torture.

Les Bayaka sont fréquemment accusés de “braconnage” lorsqu’ils chassent pour nourrir leurs familles; ils déplorent le fait que cette accusation détourne l’attention, qui devrait en réalité être centrée sur les véritables braconniers – des criminels agissant de mèche avec des dirigeants corrompus.

Les grandes organisations de protection de la nature n’ont pas réussi à empêcher l’expansion de l’exploitation forestière sur les terres autochtones et ont activement contribué à commettre de graves atteintes aux droits de l’homme. © Kate Eshelby/Survival

Parmi les victimes se trouvent des enfants, des personnes âgées et des personnes handicapées. En 2012, par exemple, un Bayaka lourdement handicapé a été agressé par des gardes. En mai 2016, un homme a été hospitalisé après que lui et quatre autres personnes aient été brutalement frappés par des gardes. Les campements forestiers sont fréquemment détruits et les populations autochtones attaquées et torturées simplement parce qu’elles pénètrent sur les terres dont elles sont dépendantes et qu’elles gèrent depuis des générations.

Un homme bayaka explique : “Si on pénètre dans le parc, ils nous arrêtent et nous jettent en prison. Même en dehors du parc, ils disent ‘On va vous tuer. Dégagez.’”

D’après les rapports de chercheurs indépendants et d’organisations telles que Greenpeace, l’exploitation forestière dans la région se poursuit à un rythme intenable. De nombreux observateurs, dont les Nations Unies et l’Observatoire congolais des droits de l’homme, ont tiré la sonnette d’alarme sur les conséquences des abus commis par les écogardes depuis 2004 au moins, mais aucune mesure efficace n’a encore été prise.

En 2005, un Bayaka racontait : “Nous avons rencontré un autre homme blanc [de la WCS] venu nous dire d’arrêter de chasser et que les gardes forestiers s’en assureraient. Maintenant nous avons peur d’aller loin dans la forêt de peur que les gardes nous attrapent.”




A visionner : Apfela décrit l’agression brutale qu’elle a subie de la part de gardes forestiers soutenus par la Wildlife Conservation Society.

Selon le directeur de Survival, Stephen Corry, “la politique de conservation dans le bassin du Congo est basée sur le vol des terres. Des parcs nationaux sont créés sur des terres autochtones sans le consentement des populations concernées : c’est de l’accaparement des terres (sous une étiquette ‘écolo’) et les grandes organisations de conservation, telles que la WCS, sont coupables de soutenir cela. Survival International fait tout son possible pour mettre fin à ce ‘colonialisme vert’. Il est temps que les conservationnistes respectent les droits territoriaux des peuples autochtones et cessent de voler leurs terres ancestrales. Ils doivent obtenir une autorisation en bonne et due forme pour chaque projet qu’ils souhaitent mener sur les territoires autochtones.”

Informations complémentaires:
- Fondée en 1895, la WCS est l’une des plus anciennes organisations de conservation de la nature au monde.
- La WCS a soutenu la création du parc national de Nouabalé-Ndoki en 1993 sans le consentement des Bayaka. C’est elle qui gère le parc depuis.
- L’organisation décerne chaque année le “Prix Teddy Roosevelt” pour la protection de la nature. En 2017, ce prix a été sujet à controverse quand il a été remis au président du Gabon Ali Bongo, vivement critiqué pour les violations des droits de l’homme commises sous son gouvernement. Selon certains rapports, Bongo aurait fait un don de 3,5 millions de dollars en échange du prix.

Madison Grant, fameux eugéniste et fondateur de l’organisation devenue plus tard la Wildlife Conservation Society (WCS). © Wikimedia Commons

- Le zoo du Bronx et l’organisation de conservation de la nature devenue plus tard la WCS ont été fondés par l’auteur eugéniste Madison Grant. Ils sont tristement célèbres pour avoir amené un homme “pygmée”, Ota Benga, au zoo au début des années 1900. Ota Benga fut exposé au public et encouragé à vivre dans l’espace du zoo réservé aux singes. Il se suicida en 1916.
- Les populations bayaka de la République centrafricaine et de la République du Congo ont écrit des lettres ouvertes à la WCS et à ses donateurs en 2016.
- Les abus commis à l’encontre des Bayaka par des brigades soutenues par la WCS sont documentées depuis au moins dix-huit ans, mais l’organisation n’a pris aucune réelle mesure pour y mettre fin.

Ota Benga, un homme “pygmée” congolais amené aux Etats-Unis et exposé dans des zoos, avant qu’il ne se suicide en 1916. © Wikimedia

La WCS n’est pas la seule ONG impliquée dans des abus contre des peuples autochtones. Nombre de grandes organisations de protection de la nature s’allient avec les secteurs industriel et touristique et détruisent ainsi les meilleurs alliés de l’environnement.

C’est une escroquerie. Et cela compromet le mouvement de protection de la nature. Survival International mène la lutte contre ces abus, pour les peuples autochtones, pour la nature, pour toute l’humanité.

“Pygmées” est un terme couramment employé pour faire référence aux peuples chasseurs-cueilleurs du bassin du Congo et d’Afrique centrale. Ce terme a acquis une connotation péjorative et certains peuples autochtones évitent de l’utiliser. Cependant il est considéré par certains groupes comme un facteur d’identité.

Certains noms ont été modifiés pour protéger l’identité des personnes autochtones.

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